Cherche pas, elle est psy. La suite
Évidemment, on ne gagne pas à tous les
coups.
Dans cette histoire, l'examen est un
bonus. Il n’arrange ni moi ni la patiente. Je refuse de recevoir les honneurs
pour avoir hypothétiquement résolu la situation. Je n’estime pas avoir gagné.
Parce que ce n’est pas le cas. Parce qu’avant que le couperet ne tombe, il n’y
avait pas de problème à résoudre. C’était la deuxième patiente de ma carrière
avec ce type de fracture. Je n’avais aucun recul et une base d’apprentissage
extrêmement maigre. J’avais accepté la douleur de Marina comme liée à la
fracture connue. J’ai causé au chirurgien dans l’unique but de savoir si à
l’avenir, je devais accepter de voir des patients semblables souffrir ainsi
parce que c’est normal avec un gros os en miettes ou finalement pas tant que
ça. J’ai juste égoistement voulu savoir si l’échec de la rééducation était
inhérent à un fait indépendant de ma volonté ou s’il fallait que je me remette
un peu plus en question. Et finalement, effectivement, la prise en charge a pu
être adaptée avant que la situation ne s’aggrave.
Que l'examen ait été réalisé ou non, qu’il
soit revenu positif ou non, je ne comprend pas la négation de la douleur de
cette patiente au cas plutôt simple, sans antécédents psy avec une pathologie à
priori purement orthopédique. La patiente a été cataloguée
« psy » parce qu’elle s’inquiétait de savoir si une telle douleur
était normale, parce qu’on a considéré à son âge, elle aurait du être plus
résistante, moins plaintive.
Mais on ne gagne pas à tous les coups.
Le psy c’est insidieux.
La colopathie, j’ai connu, j’ai vécu. A
cette époque la coloscopie j’en aurai presque rêvé. L’hypochondrie c’est ma
copine, je rêvais d’un check-up complet pour vérifier je ne vais pas mourir dans
l’année d’un vilain cancer bien caché, celui où l’on se dit toujours « et
si j’avais consulté plus tôt même si j’avais rien ». Je SUIS une patiente
psy, j’accepte qu’on me traite comme tel et je remercie de tout cœur ma médecin
généraliste de ne pas me foutre à la porte. Je la maudis quand je ne me sens
pas assez écoutée et je suis reconnaissante quand le coup de stress est passé parce qu'elle a su me rassurer malgré tout. Elle
me recadre. En ne me cédant pas ou pas toujours, elle m’énerve, je l’énerve
mais j’avance.
Je ne souhaite pas parler de ces
situations là parce qu’elles sont complexes, uniques et extrêmement difficiles
à démêler. Parce que quand on s’est donné les moyens, qu’on pense avoir fait
son maximum mais qu’on n’a toujours rien à se mettre sous la dent, la part psy
peut expliquer une partie du problème et doit être évoquée.
Et dans un cas comme celui-ci, j'aurai
probablement rejoint à tord ou à raison l'avis général.
Dans le cas de Marina, j'ai osé juger que
c'était trop simple, trop mécanique pour être psy. J'aurai pu être complètement
à côté de la plaque et je le serais probablement souvent dans ma carrière.
Parce qu'encore une fois, ce n'est pas si simple.
C’est en se posant des
questions qu’on avance.
Respecter le patient, respecter ses
plaintes et écouter pour pouvoir comprendre, démêler ces nœuds parfois
inextricables, c’est le plus difficile à faire dans ce milieu. Parce qu’il faut
faire un effort, prendre sur soi, accepter de se remettre en cause, accepter
d’être faillible, de ne pas savoir.
Je ne savais pas vraiment ce qu’était un
patient le jour de mon diplôme.
A l’école, j’ai appris à soigner mais je
n’ai pas appris à écouter.
Et comme on est nombreux dans ce cas, trop
souvent, ça coince.
Et ça coincera encore.
Mais je me soigne.
Pensées pour ma Biche qui, pendant ce temps là, souffrait
aussi de cette incompréhension mutuelle patient-soignant qui l'explique très
bien dans cet article, attention ça fait mal au coeur.
Un grand merci à tous pour avoir fait
vivre le précédent article.
Je suis vraiment touchée.
Commentaires
Moi, tout sauf coordonnée, je pose une de mes béquilles sur le tapis du salon et glisse. Réflexe, je tends le pied plâtré pour me réceptionner. La douleur sur le moment n'est pas des plus vives, mais quand j'en viens à me réveiller en hurlant dans mon oreiller, je prends sur moi et appelle mon orthopédiste.
Réponse de l'infirmier: "Tu mets le pied en l'air? Non? Bah fais-le. Et si ça va toujours pas, viens au urgences".
Aucune envie de passer des heures aux urgences pour rien, j'attends le rdv pour enlever mes broches.
Verdict: la broche du dessous était rentrée lors de la chute, enfoncée d'environ 1cm sous la peau, qui avait cicatrisé par dessus depuis...
Le chirurgien en est tombé des nues, surtout parce qu'on ne m'avait pas crue :)
Et les 3 ans sont passés ?
A voir selon les résultats !
Deux ans d'errance, et je suis une des plus chanceuses.
J'ai dû voir plus d'une trentaine de médecins différents, un ou deux m'ont vraiment crue et ont cherché à me soulager. Et c'est eux qui ont fait la différence, celle qui a mené au diagnostic.
Bon courage et plein de pensées. Les bons sont rares mais présents.
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